Chirurgie avec intelligence artificielle

Chirurgie expérimentale réalisée par un robot chirurgical piloté par l’IA

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Chirurgie avec intelligence artificielle

Une avancée majeure dans le domaine de la chirurgie robotique a été réalisée par des chercheurs de l’Université Johns Hopkins, qui ont développé un robot chirurgical autonome, le Surgical Robot Transformer-H (SRT-H), capable d’effectuer une cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire) avec une précision comparable à celle d’un chirurgien humain. En s’appuyant sur l’intelligence artificielle et une formation basée sur des vidéos de chirurgies, ce robot marque un pas décisif vers l’autonomie chirurgicale.


Une révolution dans la chirurgie robotique

Depuis l’introduction des robots chirurgicaux comme le Da Vinci dans les années 1990, la chirurgie robotique a transformé la médecine en offrant une précision inégalée et des interventions moins invasives. Cependant, ces systèmes reposaient jusqu’à récemment sur une relation « maître-esclave », où un chirurgien contrôle chaque mouvement via une console. Le SRT-H, développé par l’équipe de Johns Hopkins en collaboration avec Stanford et Columbia, repousse ces limites en intégrant une intelligence artificielle avancée, basée sur une architecture de transformeurs similaire à celle de ChatGPT.

En effet, le SRT-H a effectué avec succès des cholécystectomies sur huit échantillons de vésicules biliaires de porc, sans aucune intervention humaine. Cette procédure, qui consiste à clipper et couper les conduits cystiques et l’artère cystique, est l’une des plus courantes aux États-Unis, avec environ 700 000 interventions par an. Le robot a démontré une précision de 100 %, même face à des variations anatomiques ou des conditions imprévues, comme des tissus colorés par des teintures simulant du sang.

Un système chirurgical robotisé photographié avant une opération assistée par robot de pointe réalisée par le NHS au Solihull Surgical Hub, situé à l’hôpital de Solihull, dans les West Midlands. Le gouvernement soutient la prochaine phase de tests pour une prise de sang révolutionnaire capable de détecter 12 types de cancers, dont le cancer colorectal. Le test sanguin miONCO-Dx pourrait permettre de diagnostiquer les cancers à un stade plus précoce, rendant ainsi les traitements plus efficaces.
Date de la photo : mercredi 23 avril 2025.
(Photo par Jacob King / PA Images via Getty Images)

Comment fonctionne le SRT-H ?

Le SRT-H se distingue par son approche d’apprentissage par imitation, guidée par le langage. Contrairement aux robots chirurgicaux précédents, qui suivaient des instructions préprogrammées, ce système a été formé sur environ 18 000 démonstrations vidéo de chirurgies effectuées par des experts sur des organes de porc. Ces vidéos, capturées via les caméras endoscopiques et les bras robotiques du Da Vinci, ont permis au robot d’apprendre les 17 étapes de la cholécystectomie, de l’identification des structures anatomiques à la coupe précise.

Le système repose sur deux modules d’intelligence artificielle complémentaires :

  • Module de haut niveau : Planifie les tâches en langage naturel, comme « clipper le conduit cystique » ou « ajuster la position du bras gauche », en s’adaptant aux imprévus.
  • Module de bas niveau : Traduit ces instructions en trajectoires précises pour les bras robotiques, assurant des mouvements fluides et une correction en temps réel des erreurs.

De plus, le SRT-H peut répondre à des commandes vocales, telles que « saisir la tête de la vésicule » ou « déplacer le bras à gauche », et apprendre de ces corrections pour améliorer ses performances. Cette capacité d’adaptation, testée face à des scénarios imprévus comme des positions initiales modifiées ou des tissus altérés, le rend comparable à un chirurgien en formation guidé par un mentor.


Une précision comparable, mais plus lente

Bien que le SRT-H ait atteint une précision de 100 % dans ses essais, il est plus lent qu’un chirurgien humain expérimenté. Cette lenteur reflète un compromis en faveur de la précision, avec des mouvements plus fluides et des trajectoires plus courtes que celles des chirurgiens humains, réduisant ainsi les risques d’erreurs. Selon Axel Krieger, roboticien médical à Johns Hopkins, « ce travail montre qu’il est possible d’automatiser une procédure chirurgicale complexe avec une robustesse élevée ».

Par ailleurs, les tests ont été réalisés sur des organes ex vivo, évitant les complications des chirurgies sur des organismes vivants, comme les saignements ou les mouvements respiratoires. Cette limitation indique que des travaux supplémentaires sont nécessaires avant une application sur des patients humains.


Implications pour l’avenir de la chirurgie

Cette avancée ouvre des perspectives prometteuses pour la chirurgie robotique. En rendant les robots capables de comprendre et d’exécuter des procédures complexes de manière autonome, le SRT-H pourrait :

  • Améliorer l’accès aux soins : En reproduisant les compétences des meilleurs chirurgiens, ces systèmes pourraient être déployés dans des zones reculées ou sous-dotées en personnel médical.
  • Réduire les erreurs humaines : La précision mécanique et la capacité d’adaptation du robot minimisent les risques liés à la fatigue ou aux tremblements des chirurgiens.
  • Optimiser la formation chirurgicale : En intégrant des retours en temps réel et des analyses basées sur l’intelligence artificielle, ces systèmes pourraient former les chirurgiens novices.

Cependant, des défis subsistent. Nuha Yassin, du Royal College of Surgeons of England, souligne la nécessité d’une exploration minutieuse pour garantir une transition sûre vers des essais humains. John McGrath, président du comité de robotique du NHS England, estime que l’adoption clinique pourrait prendre plusieurs années, en raison des complexités des environnements chirurgicaux réels.


Défis éthiques et techniques

L’intégration de l’intelligence artificielle dans la chirurgie robotique soulève des questions éthiques et réglementaires. Qui serait responsable en cas d’erreur : le fabricant du robot, les développeurs de l’IA ou l’hôpital ? De plus, la dépendance à la qualité des données d’entraînement pose un risque, car des biais dans les vidéos pourraient affecter les performances du robot. Enfin, les coûts élevés de développement et d’intégration dans les flux de travail hospitaliers restent un obstacle majeur.

En outre, le passage à une autonomie complète (niveau LoA V) nécessitera de surmonter des défis comme la gestion des saignements, des variations anatomiques imprévues ou des défaillances techniques en temps réel. Pour l’instant, le SRT-H opère au niveau LoA IV, avec une supervision humaine minimale, mais représente un bond significatif par rapport aux systèmes actuels sans autonomie (LoA 0).


Vers un avenir autonome en chirurgie

Cette percée marque un tournant dans la chirurgie robotique, en passant de robots exécutant des tâches spécifiques à des systèmes capables de comprendre et d’adapter des procédures complexes. Comme l’explique Ji Woong « Brian » Kim, auteur principal de l’étude, « notre travail montre que les modèles d’IA peuvent être suffisamment fiables pour une autonomie chirurgicale, une idée qui semblait lointaine mais qui est maintenant réalisable ».

En conclusion, le SRT-H illustre le potentiel de l’intelligence artificielle pour transformer la chirurgie, en offrant une précision mécanique et une adaptabilité humaine. Bien que des tests sur des patients humains soient encore nécessaires, cette avancée rapproche le domaine médical d’un avenir où les robots autonomes pourraient révolutionner les soins chirurgicaux, réduisant les complications et améliorant les résultats pour les patients.


Sources

https://arstechnica.com/science/2025/07/experimental-surgery-performed-by-ai-driven-surgical-robot

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